Forum Red Bull/sports extrêmes

[Ouais_supère]

5.30 am. Mon portable, comme il lui fut demandé, se mue en réveil dont les dissonnances -polyphoniques parait-il- viennent s'écraser contre mes tympans endoloris. Je secoue mon cerveau comme on touille une vinaigrette, histoire de décoller les matières visqueuses du fond et les amalgamer au jus. Une nuit très peu ensommeillée, finalement, la faute au speed anticipé d'un rencard tôt le matin et à l'autre bout de la ville, et à l'angoisse de ne pas se réveiller à temps.

Faut savoir que la veille, en milieu d'après midi, je m'étais mis un coup de pied mental pour aller porter un contrat signé - le dernier de ma précédente mission, une sombre histoire de manutention et de portes à déplacer d'un bout à l'autre d'un immense entrepôt, à dos d'homme s'entend- à mon agence d'interim. Je me suis entendu balancer, avant de prendre la fuite, "et aussi, je venais voir si vous aviez un truc pour moi, ces jours-ci". Le genre de phrase dont la raison te commande l'articulation intelligible et sonore pendant que ta fainéantise te hurle "non non, ta gueule, ta gueule, ta gueule".
"Ah ben justement je viens de recevoir quelque chose".
Et merde.

6h57, purée c'était juste. Avec mon gros blouson dont l'élastique trop fermement tendu fait remonter le bas vers le haut et mes deux jambes de nabot, j'ai l'air d'un tonneau sur pattes. Je remercie la nuit hivernale de tarder autant à s'envoler. Noire, la nuit, d'ailleurs, dans cette zone indus encore à peu près endormie. Un groupe de mec dont chacune des voix me semble plus aisément vociférante que la mienne ne fut jamais, même en tentant de tout déchirer mon larynx, rit à gorge déployée, encerclant l'un des leurs qui changeait accroupi la roue crevée de son 4x4 flambant neuf.
Je chope au passage un nouvel arrivant.

"Euh, bonjour, excusez-moi, je suis l'intérimaire qui, euh, et je voulais savoir, j'fais quoi, j'vais où?"
A peu près.

"Ha ha, bonjour! Ben t'attends! Ici quand t'arrives faut attendre, c'est comme ça que ça se passe! Ha ha ha!", me lance, bon homme, un mec dont l'obscurité m'interdit tout d'abord l'identification précise, mais dont je distingue déjà une certaine corpulence, quoi qu'il fut petit, mais pas de ces corpulences adipeuses de vieux commerçant qui se laisse aller, non. Une corpulence ouvrière, ferme, une carcasse comme pour mettre son habitant psychique à l'abris des "balles", verbales ou circonstancielles, ou bien même des vrais de gun, d'ailleurs, avec un peu d'imagination.

Tout le monde est arrivé, et surtout le boss, le maître des clefs dont l'insertion dans la première serrure signifie visiblement et tacitement "au boulot!" Des groupes sont créés, je suis un peu en retrait mais je comprend que ça se passe en binômes, dans cette boîte, chacun se voyant assigné un véhicule lourd pour partir s'acquitter de sa mission. Ailleurs.
Nous ne sommes plus que quelques uns, cinq tout au plus, et je pige qu'il y a une couille dans le potage. Un mec est absent, malade, et que c'était pas prévu du tout. Tergiversations, agitation, jusqu'à ce que fuse un "bon ben vous partirez à trois", suivi de soupirs consternés.
C'est moi, le numéro trois.
Rien n'a encore commencé pour moi, et je me retrouve déjà dans le rôle du boulet qu'il va falloir se traîner toute la journée. Je tire vigoureusement sur mon clope, comme pour y puiser des nerfs.

"Allez hop, on y va, tu nous suis!" Même pas pu finir ma blonde. C'est le mec de tout à l'heure. Je dois dire que je suis un peu rassuré, après tout, de toute cette clique, c'est celui que je connais le mieux. Mais bon. Tout ça me fait chier, j'ai pas envie de bosser, j'ai à peine dormi, je suis gelé, pourquoi faut-il que je sois si raisonnable? Suffisait de téléphoner à l’agence, style "j'ai choppé la mort en rentrant chez moi hier, je suis cloué au pieu par la fièvre, j'en suis navré mais sans moi aujourd'hui". J'y ai sérieusement songé, d'ailleurs, un peu plus tôt dans la matinée, vers 5h32, à peu près.
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We're gonna need a bigger boat...

[Ouais_supère]

(suite)

Me voilà donc embarqué en direction de Auch dans ce petit camion avec deux mecs qui ont à peu près autant besoin de moi que moi de leurs grivoiseries grimaçantes au sujet de la condition féminine façon brèves de comptoir sans Carmet pour la finesse de l'élocution et la brillance du regard. Je suis entre eux, au milieu, qui plus est, et j'ai l'impression que leurs vannes minables me transpercent plutôt que de sauter par dessus moi pour atteindre l'oreille de leur destinataire.
Pour le coup, je remercie chaleureusement et larmes aux yeux Jean Jacques Goldman, dans la radio, qui investi l'espace et obtient le silence, parce qu'apparemment les lascars aiment bien Goldman, tant mieux pour moi cette fois-ci. "Envole-moi", putain mais ouais, quoi, je signe où?

Cligno, relais routier, on stoppe pour un café. Ouf. Assis, attablés, je me détends. Le café-clope déchire mon estomac anxieux et quasi-vide, si on fait pas gaffe au pauvre yaourt ingurgité au lever, et qui doit traîner quelque part au fond. Je revis, quelque peu, la fumée de Marlbak me tourne la tête, ça fait tout chaud, au-dedans. Mes deux gars fument beaucoup, parlent de choses et d’autres, je me prends même à participer. Soudain ça s’assombrit, je comprends qu’un mec, un pote à eux et surtout à celui qui m’a accueilli, est mort. Genre deux semaines plus tôt. Je laisse une pause, et j’ose : « qu’est-ce qui s’est passé ? ». Il suspend le temps à son tour puis me raconte. Je vais pas vous la refaire, une histoire de câble qui lâche et qui propulse un objet dans une tête de 25 ans. Il triture sa Winfield de ses grosses mains de cinquantenaire usé au bout d’un corps de 40 balais à peine, pourtant. Clin d’œil mouillant, il me dresse l’éloge d’un type toujours serviable, gentil, disponible, bon fêtard, et tout. C’est sans doute partiellement faux mais lui le pense vraiment, et y a plein d’émotion qui circule tout autour et au travers de lui. Et voilà, c’est foutu, je peux plus le détester, j’ai touché de l’humain, ce mec existe bel et bien au-delà de mon cliché sur ces bourrins d’ouvriers en bâtiment. L’autre, petit bonhomme voûté au crâne rasé et à la lubricité affichée, je vais même l’aimer un peu aussi, par le rayonnement de son collègue.

Le boulot ? Ah oui : ben là ça se passe au Crédit Lyonnais de Auch, qu’ils sont en train de refaire. Celui que je considère comme mon chef est sur son échafaudage, il agrafe des plaques sur lesquelles viendront se fixer, un de ces jours, des matières isolantes, des plaques que moi et le petit rasé lui faisons passer. Du taf pour une personne et demi, et on est trois. Ca vous donne une idée du rythme de travail. Pas trop vif. Se joignent à nous des maçons qui cassent des trucs et balayent les gravas, ambiance détendue, blagues sexistes et sexuelles, assénées avec de l’accent de Toulouse, ce truc qui grince en fin de phrase et surtout sur les « in » et qui se fait un devoir de laisser se prononcer chaque lettre, même celles qui faut pas, normalement. Je me fais chier mais je vais pas me plaindre, on va me payer, et plutôt bien. A 14h, tout est plié, retour à la boîte, pour quelques menues manutentions préparatoires à la journée de demain, à laquelle je ne prendrai pas part avec eux parce que mon binôme sera sans doute revenu. Ce sera encore autre chose mais je vous en épargnerai le récit.
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We're gonna need a bigger boat...

[Sade_emménage]

Moi, ce que je retiens avant tout de ta journée, c'est que t'as pondu un texte au top en rentrant chez toi. J'sais pas si tous les mecs dans l'bâtiment ont autant d'inspiration, mais, continue dans cette voie !
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lol mdr mes bon ces ke mon avis a+

[Waza]

10/10
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«pff decé gamin a uez diam's o moin elle elle ecrit d texte les compose et les interprete c pa une tite focu kome certain o moin elle dit skelle pense franchement ya bcp de gamin sur terre diam's c une des mielleur alor fermer votre G***E ok vou mfete pitier»

«vive dieudo tu parle ca faisai rir tou le monde oué ci on peu plus rir ..a tu m etonne kan ca touche les juif ca derange il detienne la plus grande puissance du monde les media pourca kil é boycoté pff c pa un antisemite bande de charlo»

[Alex]

Bonne idée Manu! Je tenterai de faire la même chose, prochainement

[raie ma noeud]

[Sade_emménage]